Le jour où j’ai parlé de Business et de Handicap à la Télévision française

 

Après avoir compris le besoin : une personne en situation de handicap est restreinte dans ses mouvements et ne peut parfois pas (ou avec difficultés) enfiler un vêtement pour s’habiller ;

 

Après avoir compris notre fonctionnement : nous développons nos collections avec un bureau de style lyonnais puis nous achetons les matières et accessoires en France, en Espagne, en Italie et aux Pays-Bas. Nous envoyons ensuite dossiers techniques et achats aux partenaires de fabrication étrangers : en Ukraine, au Portugal ou en Tunisie. Une fois la marchandise entreposée à Lyon, nous nous déplaçons dans les centres médico-sociaux (Maisons d’accueil spécialisées, Foyers d’accueil, Instituts médico-éducatifs etc.) pour organiser des ventes éphémères. Les résidents en situation de handicap, les familles, les équipes (ergothérapeutes, aides-soignants, etc.) sont présents pour découvrir, essayer, et commander nos vêtements ;

 

Il fallait maintenant parler business et approfondir les éléments financiers de l’entreprise. Les investisseurs doivent s’assurer que le modèle économique répond à la norme et qu’il est viable avant de s'aventurer à leur tour !

  • Que souhaitez-vous faire avec le financement recherché ? 
  • Quelle est votre marge brute ? 
  • Quand serez-vous rentable ? Pourquoi est-ce si long ? 

 

Pourtant toujours très transparente sur notre activité, l’une de mes appréhensions en participant à ce programme était de dévoiler les éléments financiers à des millions de téléspectateurs. Tout le monde ne travaille pas dans un service comptable ou financier, tout le monde ne maitrise pas le jargon économique et qui finalement, parmi la future audience, pourrait avoir une parfaite compréhension des tenants et aboutissants d’une « levée de fonds » ? 

 

Ne pourrait-on pas me montrer du doigt car j’annonce une levée de fonds de 500 000 euros sans comprendre qu'il s'agit d'un besoin réel en fonds pour faire vivre l’entreprise et continuer à développer notre activité ? 

 

 

Business et Handicap, font-ils bon ménage ?

J’ai créé cette entreprise parce que je suis confrontée à une réalité ; il est très éreintant d’habiller une personne polyhandicapée avec un vêtement « standard ».  

 

Comment résoudre mon problème et diffuser ma solution au plus grand nombre ?

-> Constant & Zoé a répondu à cette question.

 

Nos vêtements sont astucieux, nos 3 000 clients sont fidèles. Ils nous envoient toutes les semaines des photos d’eux avec nos vêtements, nous remercient avec une jolie carte, par sms, par email et parfois même prennent le temps de nous appeler pour simplement saluer notre travail.  

 

Mais l’entreprise n’est encore pas rentable, après 4 ans d’activité. 

Cela signifie que nous dépensons plus d’argent que nous n’en gagnons. 

 

La Recherche & Développement des produits prend du temps et coûte cher mais il faut aussi compter tous les frais de fonctionnement de l’entreprise : salariés, charges, mutuelles, frais de déplacement dans tous les centres médicaux de France, supports de communication, loyers du local et des bureaux, frais de transport, assurances, impôts et taxes etc. 

 

Notre marge brute de 72% ne nous permet pas aujourd’hui de couvrir le coût de fabrication des produits et tous les frais cités ci-dessus.

Notre marge nette est aujourd’hui négative. 

 

Nous devons donc : 

  • améliorer notre marge qui, tout en étant correct par rapport à nos volumes, reste aujourd’hui en dessous de la norme du prêt-à-porter
  • et réduire nos charges. 

Il est donc vital pour Constant & Zoé de réunir 500 000 euros pour maintenir son activité et investir jusqu’à devenir rentable dans 3 ans. 

 

Une heure et demi d’échanges avec les investisseurs

Delphine ANDRÉ, Catherine BARBA, Marc VANHOVE, Éric LARCHEVÊQUE et Marc SIMONCINI doivent maintenant juger ma présentation et me faire part de leurs décisions.

 

Un silence me fige. Les cinq investisseurs me fixent sans rien dire. 15 secondes qui me sont apparues comme une éternité. 

 

Dans un précédent article, j’avais expliqué comme le plateau et ses lumières avaient pu être déstabilisants. Je confirme ! Avec le recul aujourd’hui (et la mémoire qui est de retour), je me souviens que la production m’avait précédemment expliqué qu’il se pourrait que les investisseurs restent silencieux en fin de débat. Chacun d’eux dispose d’une oreillette et pour le besoin des prises, la production demande un moment sans intervention entre la phase de confrontation et la décision. La production distribue ensuite la parole à chacun via l’oreillette. Les investisseurs écoutaient. En me regardant. En silence. Derrière mon assurance apparente, j’ai cru vouloir disparaître. 

 

Catherine BARBA, aussi chaleureuse et encourageante que celle que l’on m’avait décrite prend la parole la première. Elle félicite ma démarche et souhaite accompagner Constant & Zoé. Elle souhaite avoir les commentaires de ses amis-investisseurs et envisager un co-investissement.

Delphine ANDRÉ, prend la parole à son tour et je comprends alors qu’elle est très émue. À cet instant, l’émotion a envahi le plateau aussi rapidement que de manière imprévisible.

 

Présente depuis 10h30 sur le lieu de tournage, tenue tant par l’excitation de cette folle aventure que par le stress, j’étais éprouvée. Les larmes de Madame ANDRÉ m’ont touchée sans prévenir :) ; j’étais venue défendre Constant & Zoé avec dynamisme et joie ; je n’avais pas pu imaginer un tel dénouement.

Il s’agissait toutefois des larmes de joie et de soulagement. Quelle pression ! Madame ANDRÉ annonçait également son envie de nous accompagner et d’aider au développement de la marque. 

 

Toutefois, la pression n’était pas totalement retombée puisque je n’avais finalement encore reçu aucune proposition concrète. Veulent-ils nous aider en investissant ? en nous conseillant ? en nous mettant en relation avec leurs différents réseaux ? Que cela signifie-t-il ?

 

Éric LARCHEVÊQUE sera le premier à faire une proposition concrète. En appelant au co-investissement également, il annonce vouloir participer à hauteur de 75 000 euros. Premier vrai soulagement !  

 

Marc SIMONCINI nous fait également part de sa volonté de soutenir Constant & Zoé car il faut des entreprises qui changent le monde !

 

Difficile de décrire ce que je pense à ce moment, tout va à la fois très vite mais le suspense tient son rôle jusqu’au bout ! J’avais voulu leur faire découvrir mon histoire, mon entreprise, ma vie et seule une petite partie de moi pensait pouvoir convaincre deux ou trois investisseurs parmi ces grands entrepreneurs. Je n’étais plus préparée à ce qui était en train de se passer. Je restais silencieuse face à leurs commentaires et tant de compliments.

 

 

Delphine ANDRÉ propose un investissement commun : 

« Chacun pourrait investir 50 000 euros, qu’en pensez-vous ? »

 

Marc VANHOVE, qui m’avait pourtant bien challengée tout au long de l’échange :) décide aussi d’accepter cette proposition qui marquera mon soulagement final. 

Il finira donc par rappeler : « Vous initiez une levée de fonds à hauteur de 500 000 euros et vous nous proposez d’en faire partie à hauteur de 200 000 euros pour 10%. Nous vous proposons 50 000 euros chacun, soit 250 000 euros, pour 12,5% de votre entreprise, êtes-vous d’accord ? »

 

Un peu bouleversée par ce qui venait de se passer, je me souviens avoir dit « J’avais prévu de téléphoner à l’un de mes actionnaires pour échanger avec lui si j’avais une éventuelle proposition… je crois que je n’ai pas besoin de le faire ! ».

Puis je bafouille timidement des remerciements ; 

L’issue de cette journée n’aurait pas pu être meilleure.

 



 

Merci Mathilde de nous avoir « repérés » ; merci pour ta persévérance car je n’ai pas été facile tout au long du processus de sélection.

Merci Sony Pictures Television de m’avoir fait vivre cette incroyable expérience.

Merci M6 de permettre à cette adaptation française de voir enfin le jour. Merci de prendre ce risque. 

 

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Commentaires: 2
  • #1

    Charles (mercredi, 22 janvier 2020 00:53)

    Tres bel article et belle emission qui va inspiré de nombreux français, ça fait plaisir...
    bonne continuation dans votre projet, c’est un beau combat !

  • #2

    Julien (mercredi, 29 janvier 2020 23:24)

    Bravo pour cette transparence sur l'émission et votre pudeur touchante vis à vis des marges. Vous déployez une énergie remarquable, je vous souhaite tour le meilleur pour votre marque !